22 avril 2013

Regarde les hommes partir

La France s’affole, les riches partent. Le nombre d’exilés fiscaux aurait été multiplié par cinq depuis juillet dernier. Un chiffre de 5000 départs que le ministère de Budget ne confirme pas. Les Belges, eux, s’inquiètent d’une autre émigration, très différente, celle des jeunes Belges partis combattre en Syrie aux côtés des rebelles. La presse s’affole : ils seraient déjà 200 volontaires à avoir rallié les forces anti-Assad ! Les organisations musulmanes condamnent. La situation est grave car la guerre, c’est contagieux. Comment fera-t-on pour « recycler » les combattants quand ils rentreront au bercail ? Comment les réhabituer à prendre le tram, manger de l’américain-frites, à supporter la « drache » (pluie) 300 jours par an en moyenne ? Les pouvoirs publics songent à édicter un arrêté royal interdisant aux ressortissants belges de se battre en Syrie. Voilà une bonne idée ! Cessez de vous faire la belle, le gouvernement-qui-veut-votre-bien vous l’interdit.
Reviendez, reviendez ! Le braqueur Redoine Faïd, auteur d’une spectaculaire évasion de la prison de Sequedin (Lille) la semaine dernière, entendra-t-il lui aussi le message ? Mais où est-il ? Par monts et par vaux ? Méditons le mot d’Alexandre Dumas : « Cette route de l'exil, dont le chemin est si large pour ceux qui partent, si étroit pour ceux qui reviennent ».

4 avril 2013

Merde in France

Les Français ont 20% de chance en moins d'être heureux, affirme une chercheuse, Claudia Selnik. Ses recherches portent sur « l’économie du bonheur ». On a tendance à pouffer de rire ; quand l'économie du malheur sera-t-elle étudiée et scrutée ? Et celle de l'ennui ? Selon cette chercheuse, il y a une dimension culturelle du bonheur (on s'en doutait un peu, vu que le terme est aussi glissant qu'une anguille..). Et les Français, structurellement, seraient malheureux. Ils sont les manchots du bonheur, pas de bras pas de chocolat.
A force de mesures statistiques forcément très savantes, Selnik a mis en évidence l’existence d’une mélancolie française, d’une inaptitude des Français à se dire aussi heureux qu’ils le devraient. « Le malheur français, c'est quelque chose qu'on emporte avec soi », affirme-t-elle. Même quand on quitte son pays. Nous sommes maudits, la merde française nous collerait-elle aux semelles ?
Moi, je me sens très bien. C’est parce que je viens de voir à la télé Kalki Koechlin, une actrice née à Pondichéry de parents français : c'est la nouvelle star de Bollywood (oui, ces films indiens super-guimauves à côté desquels les westerns spaghettis ressemblent à du Sophocle). Kalki parle français avec un accent étonnant et elle est radieuse. C'est une Marianne d’un nouveau style à elle toute seule. Je vote Kalki.
Elle est plus convaincante que Véronique Genest, comédienne devenue d’un coup de baguette cathodique la suppléante d’un candidat à l’élection législative partielle dans la 8e circonscription des Français de l’étranger. Celle qui s’est pris les pieds dans le tapis avec un lapsus (« je suis un étron libre ») qui fait rire tout le monde ferait mieux de rester chez elle. Electron, étron… la voilà marron.

22 mars 2013

Familles, je vous hais


Les enfantophiles n’en mènent pas large. Les prestations familiales sont dans le collimateur du gouvernement. Il était temps d’y songer. Il faut vraiment que les caisses de l’Etat soit vides : on s’aperçoit (enfin !) que les montants abyssaux consacrés à encourager la natalité sont totalement déraisonnables. La politique familiale française, unique au monde, coûte environ 5% du PIB français, soit près de 100 milliards d’euros par an. Prestations familiales, aides au logement, fiscalité… Un délire nataliste que n’aurait pas renié le bon Maréchal.
Avec ces sommes, il serait plus intelligent de régler le problème de la dette, de sortir du nucléaire, de résoudre la question de la pauvreté… Au choix. Justement, le choix, le contribuable ne l’a jamais eu, vu qu’il n’y a jamais eu de débat. Tabou. « Avoir des enfants, c’est bien, et rien n’est plus beau qu’un sourire d’enfant », écrivait il n’y a pas si longtemps l’un des grands Timoniers du Nouvel Obs. Une phrase forte que n’aurait pas renié Le Figaro.
Perso, si j’habitais en France, j’entrerais en désobéissance civile. Pas question que l’argent de mes impôts servent à fabriquer de nouveaux Français, destinés de devenir de nouveaux chômeurs. Qu’on y pense… Plus d’enfants, c’est plus de monde dans les trains le 1er août, plus de queue à Pôle Emploi, plus de crottes de chien dans votre rue. C’est plus de pollution, toujours plus de zones péri-urbaines hideuses, de lignes électriques, d’antennes relais, d’échangeurs autoroutiers. C’est aussi moins d’espaces naturels, moins d’espace tout court.
De mon point de vue, la France est bien assez peuplée. Et si certains veulent des gosses, qu’ils se les paient. A bon enfanteur, salut.

17 mars 2013

On fait la fête aux châteaux

Le nucléaire, c’est dangereux. Ça tue. Et ça empoisonne l'environnement pour des centaines de milliers d'années. On s’en doutait un peu, mais en France, pays nucléophile par excellence, ça mérite d’être dit et redit. Non seulement c’est dangereux, mais c’est cher. Prenons l'hypothèse d'un accident nucléaire. Le coût : 430 milliards d'euros par réacteur explosé, selon un rapport de l'IRSN. D’après un article du journal Monde daté du 10 mars, le gouvernement pourrait alors être contraint… de vendre le château de Versailles pour dédommager les victimes. Oui, vous avez bien lu. Payer en châteaux, quand même, c’est royal.
Admirons l’égalité : un réacteur = un château. L’homme aux rats de Freud, ce névrosé bien connu, comptait en rats ; le bureaucrate formaté par l’histoire de France, lui, compte en châteaux. Pour les gros postes budgétaires, compter en kilo-châteaux.
Petit exercice pratique. La centrale de Cattenom, c’est 4 réacteurs nucléaires à elle toute seule. Alors en châteaux, ça fait… Amboise + Chambord + Blois + Chinon, ça suffira-t-il pour payer la douloureuse ? Mais où sont les bureaux de change ?
« Le pape de Rome, c’est combien de divisions ? » demandait ironiquement Staline. La France, c’est combien de châteaux ? Et mon cul, combien de poulets ?

11 mars 2013

Les vaches violettes meuglent "moins, moins"

La Suisse, pays des coucous, remet les pendules à l’heure. Ses habitants viennent de plébisciter l'octroi aux actionnaires d'un droit de veto sur le montant des salaires des patrons. C’est un véritable tsunami sur le lac de Genève. A l’origine de ce référendum d’initiative populaire anti-pognon fou, un chef d’entreprise indigné, Thomas Minder. Minder… Curieux, cela veut dire moins en allemand. Moins, toujours moins ! Voilà la logique des mots qui triomphe.

25 février 2013

J'ai bouffé du cheval

Vive les duos. Qui ne connaît Dolce - Gabanna ? Et le duo de plume Fruttero - Lucentini, ces auteurs de polars italiens bien ficelés ? Et Albano - Romina Power, qui ont escaladé jadis les hit-parades avec le tube « Felicità » ? La France aussi tient à présent son couple de choc : il s’appelle Spanghero - Castel. Le premier s’illustre dans les lasagnes au canasson, le second dans la viande pourrie. Ce rata pas ragoûtant est mis et remis dans le circuit pour le meilleur bénéfice des intermédiaires alimentaires. Aux yeux de certains, ni l’argent ni la viande n’ont d’odeur. Il faut bien de petits arrangements avec la qualité, car un Occidental mange en moyenne l'équivalent de 21 000 animaux entiers durant son existence ; on se doute bien que ce n’est pas toujours du premier choix. Le droit démocratique de manger de la merde doit donc être défendu bec et ongles (de même que le droit de coucher avec des connards, comme le montre une actu récente qui sent le slip sale).
Mais revenons à nos moutons - chevaux. Tout le déballage actuel sur les dessous pas nets de l’industrie de la bidoche a permis de mettre en circulation un nouveau terme : le « minerai de viande ». C’est une ragougnasse agglomérée d’où proviennent les lasagnes, hachis, chili con carne, moussakas et autres steaks hachés industriels. Ami gastronome, bonjour. On imagine de nouveaux dialogues en prise avec l’actualité : « Ma puce, n’oublie pas d’emporter ton minerai de viande pour ton week-end chez les scouts ». « Mamie, ne te fatigue pas pour le dîner, on apporte le minerai de viande. » Pendant ce temps-là, Findus se fait un sang d’encre. Son business risque de tourner en eau de boudin. Qu’il ferme, tant pis pour lui - on achève bien les chevaux…
A lire : Jonathan Safran Foer, « Faut-il manger les animaux? », L'olivier, 2010.

22 février 2013

Va te faire recuire dans un minerai de viande roumaine

Vive la France ! C’est le titre d’un film récent, dont les affiches se sont multipliées sur le quai du Thalys, ce train écarlate (le fameux « rouge thalys ») qui relie Paris et Bruxelles. Mais je ne compte pas aller le voir, car le « pitch » du réalisateur sur France2 (« La France est un beau pays, j’aime mon pays ») ne m’a pas fait envie. Premier degré, nous voilà ! Laurent Lafitte, acteur d’un autre navet franchouille, « De l’autre côté du périphérique », se livre lui aussi à un petit numéro de patriotisme dans une interview : « Je dois beaucoup à la France, j’y ai effectué mes études au Conservatoire, jamais je ne la quitterai ». S’il avait voyagé, il saurait que d’autres pays dans le monde – pas croyable !- ont réussi à construire des écoles et à former la jeunesse.
Par contre, il y a un truc qui manque, chez nous, ce sont les intellos anti-France ; ou plus exactement des gens qui interrogent les mythes fondateurs nationaux et qui critiquent leur pays. L’Amérique a (entre autres) Noam Chomski et Michael Moore, la Suisse a Jean Ziegler, Israël a Schlomo Sand. En France : rien. Le livre le plus critiqué de BHL, un personnage qui tient pourtant en laisse les médias de France et de Navarre, a été L’idéologie française, un ouvrage cinglant qui allait dans la bonne direction, celle de la réflexion de fond sur l’Hexagone. Et, quand Béatrice Durand sort son excellent essai La nouvelle idéologie française en 2010, c’est le calme plat. Même chose pour mon livre Tchao la France, accusé d’être un ramassis de lieux communs.
Il est vrai que je n’y vais pas de main morte. Je l’avoue dans ce livre, je ne dis pas merci à la France. J’y ai été scolarisée, la belle affaire ! Je n’y ai rien fait que je n’aurais pu faire ailleurs, dans d’autres pays occidentaux. J’ai eu un boulot crétin en entreprise, comme beaucoup de gens, et je n’ai pas de reconnaissance à exprimer pour ça. J’ai publié des livres qui auraient pu l’être sous d’autres cieux, la preuve : ils ont été traduits dans plusieurs langues. Je ne jouis d’aucun poste envié au sein de commissions, de comités, de conseils. Je n’ai jamais voyagé aux frais de la princesse, jamais touché un euro sur le dos du contribuable (il faut le reconnaître, par ignorance du mode d’emploi autant que par honnêteté). Je n’ai jamais bénéficié d’un emploi fictif ; euh… Pour ce dernier, il est peut-être encore temps. Alors, oui, je postule, et qu’on se le dise, j’aime la France. Je l’aime, c’est un pays magnifique, et ceux qui la critiquent sont des traîtres – mon CV, je l’envoie où ? Ces salauds d’anti-France, qu’ils aillent se faire recuire ailleurs ! Dans un minerai de viande roumaine, par exemple !