Il s’en passe des choses à Paris ! Mais si, mais si ! Michalon Editions a porté plainte pour diffamation et injures contre deux auteurs, Clément Maraud et moi. Du jamais vu en Intello-land, un milieu où se multiplient pourtant les trappes sournoises et les bâillons fermetagueulistes. Mais alors, où est passée « l’effervescence du débat » revendiquée haut et fort par cette noble équipe de combattants des libertés ? La maison de la rue de Lancry n’est peut-être pas soluble dans les droits de l’homme qu’elle prétend défendre bec et ongles.
S’il le faut, Clément et moi, nous passerons Noël au gnouf. Voilà une idée originale pour mettre du peps dans le sapin. Après tout, j’ai toujours détesté les fêtes de fin d’année, et j’ai appris dans Un roman français que la prison est hype. Me voilà ! Brigadier, je me constitue prisonnière ! Où sont les menottes, la maison d’arrêt, les matons, le mitard ? Mazette, la liberté est surfaite.
On rappelle en quelques mots que la faillite des « éditions Michalon » en 2008 (trois millions d’euros de passif) a fait autant de dégâts qu’un bulldozer sur les îles Galápagos (voir rubrique « témoignages » sur ce site). Mais Michalon, reprise (en même temps que tout le catalogue de droits) pour une bouchée de pain par les éditions Max Milo, continue à publier, sous le doux nom de « Michalon éditions » (et ron et ron petit patapon). La structure juridique change mais tout reste pareil. N’est-ce pas l’essentiel ?
Eric Naulleau, par ailleurs féroce aboyeur des lavages de cerveau télévisuels, a montré la voie. L'histoire commence en 1998. Un homme d’affaires espagnol, Rodrigo de Zayas, finance les activités éditoriales d'Eric. Les deux hommes s'associent pour fonder une société, L'Esprit des péninsules. Las, l’argent fait vite défaut. En 2007, le tribunal de commerce de Paris place la société en redressement judiciaire avant d'en ordonner la liquidation. Ni vu ni connu je t’embrouille : on apprend qu’en 2003, ce petit cachottier de Naulleau avait déposé la marque « L'Esprit des péninsules » à l’insu de Zayas. Rusé, non ? Naulleau continue donc à exploiter cette marque sous le pavillon de l’éditeur Jean-Claude Gawsevitch. Sauf que… les meilleures choses ont une fin, et Naulleau a été condamné pour manœuvre frauduleuse en novembre 2010 par la cour d’appel de Paris.
Et maintenant, un petit cours d’édition pour les débutants.
-Tu montes une boîte, et pour ça tu tires du fric là où yen a (de multiples gogos rêvent de mettre un pied dans le secteur de la culture).
-L’argent part vite, surtout quand on est mauvais gestionnaire ; peu importe. Tu fais lanterner les imprimeurs, correcteurs, les free-lance que tu exploites, mais aussi les auteurs.
-Les huissiers débarquent ? Il suffit de ne pas ouvrir quand ils sonnent. Ben ouais, “It is the economy, stupid !”
-Le tribunal de commerce ordonne la cessation de paiement ? Ça gèle les créances, tu peux sans bourse délier continuer ton taf pendant près d’un an.
-La faillite… Oui, enfin, ça n’est qu’un mot. Tu te débrouilles pour déposer la marque ou être racheté pour deux francs six sous par un pote. Comme ça, ça t’allège des dettes de la boîte, et tout peut continuer. Comme si de rien n’était, pour reprendre le titre d’un album de Carla Bruni.
Et voilà ! Pigeon, vole ! Elle est pas belle, la vie ?