26 novembre 2012

ça plane pour moi


J’ai passé le week-end à Notre-Dame-des-Landes, en Bretagne. Une chouette destination pour se ressourcer au vert. Car du vert il y en a là-bas, du moins pour l’instant. Jouxtant le bocage, le voyageur esthète déplore pourtant une zone péri-urbaine moche. Elle s’explique par le dynamisme de la fécondité française (on ne lui dit pas merci). Pour autant, celle-ci ne justifie pas la construction d’une nouvelle aérogare : il y a en déjà 5 dans le coin. Et la France compte déjà 156 aérodromes, contre 44 en Allemagne, 43 en Grande-Bretagne.

« Pas d’aéroport » est le mot d’ordre. Le concept est fédérateur. Aussi, la diversité des participants est-elle au rendez-vous : paysans bourrus, seniors tranquilles, jeunes portant bonnets péruviens ou dreadlocks… Un carrefour générationnel. Certains participants s’expriment avec une pointe d’accent allemand ou anglais, et ce sont de véritables ambassadeurs de l’approche multiculturelle. Tout ce petit monde, de plus en plus nombreux, converge pour transformer l’endroit en lieu de vie convivial. C’est chaleureux et sans chichis.

Si vous devez vous rendre sur la « zone à défendre », comme on dit en dialecte local, évitez les plateforme boots et les talonnettes. Ce n’est pas très pratique pour courir à travers champs et contourner les barrages des forces de l’ordre. Le dress code ne pardonne pas dans une région qui, il faut le dire, ressemble à un marécage dès qu’il pleut, c’est-à-dire souvent.

Vous avez aimé les seventies ? Vous allez adorer Notre-Dame-des-Landes (NDDL, pour les initiés). Une multitude d’activités ludiques, chaque jour renouvelées, y sont proposées : parcours accrobranches, ateliers de construction solidaire, camping à la ferme, pique-nique géant, occupation et réoccupation de cabanes, cache-cache avec les gendarmes… Attention car ceux-ci, emportés par la fièvre du moment, ne connaissent pas leur force. Côtes cassées au flashball, plaies, problèmes oculaires et auditifs dus aux grenades lacrymogènes et assourdissantes ? Un PC de secours vous tendra les bras.

Ce qui compte, c'est que l'éthique soit au rendez-vous. Toutes ces activités anti-aéroport sont citoyennes et respectueuses de la biodiversité. NDDL se positionne donc comme the place to be. Mais un autre site, la forêt de Hambach en Allemagne, rivalise auprès du public pour le dynamisme de l’animation. Là-bas, des activistes occupent un lieu destiné à devenir une gigantesque mine de lignite à ciel ouvert. Très tentant pour le week-end prochain. J’hésite. Depuis Bruxelles, il est plus facile de se rendre à Hambach. Car le point noir de NDDL, c’est quand même l’absence d’aéroport…

20 novembre 2012

La France en string

Une vaste cabale anti-France est en cours. Tout le monde s'acharne contre l'Hexagone. Comme ils sont méchants ! Après l'agence de notation Standard and Poor's il y a quelques mois, c'est au tour de Moody's de lui retirer un A, un tour de cochon alphabétique qui sanctionne la perte de compétitivité du pays (j'adore le mot "compétitivité" : personne ne sait exactement ce qu'il signifie). Rien d'étonnant selon The Economist, magazine britannique revanchard qui consacre un dossier peu amène à la France, cette "bombe à retardement au coeur de l'Europe". Un pays poussif, endetté, dirigé par des mous, écrasé par le poid de l'Etat, où les salariés coûtent trop cher aux employeurs... Trop cher ? Qui est trop cher ? L'hebdomadaire oublie de dire que les patrons français sont mieux payés que leurs homologues européens (selon l'European Corporate Governance Institute). Et ce n'est pas Arnaud Lagardère, à la tête d'un groupe de 27000 salariés, qui va redorer le blason des patrons. Arnaud, désormais "Nono", présente sans tabou sa vie avec la très jeune (et très grande) Jade dans un documentaire montré par la RTBF belge le 13 novembre dernier. La tonalité de bling-bling vulgos du film constitue une vraie bombe anti-patriotique. Ce n'est plus un short qu'on taille à la France, c'est un string. La question n'est plus "Comment peut-on être Français ?", mais bel et bien "Comment peut-on vivre en France?"

14 novembre 2012

Les Indignés de l'édition


Les « caves » du monde du Livre se rebiffent. Une quinzaine d’auteurs et scénaristes de renom de Casterman, une maison de BD récemment rachetée par Gallimard, protestent contre les diktats de leur nouveau propriétaire. Ils se sentent, disent-ils, « instrumentalisés en vue d’un transfert purement capitalistique ». C’est hélas la triste condition de l’auteur dans ce monde de brutes qu’est l’édition.

Un univers impitoyable qui compte d’autres Indignés, certes moins prestigieux, mais non moins remuants. Il s’agit de ceux qui sont restés sur le carreau suite au rachat des éditions Michalon par Max Milo en 2009. Le « dîner des cons » que nous avons organisé il y a quelques années a permis d'informer sur certains « dirty secrets » que les éditions auraient préféré garder sous le tapis. Michalon, qui prétend défendre « l’effervescence du débat », a alors porté plainte pour diffamation contre certains d’entre nous. Notons qu’il n’est pas fréquent qu’un éditeur intente un procès de ce genre à ses auteurs et collaborateurs.

Le verdict a été rendu le 13 novembre 2012 par la 17e chambre correctionnelle de Paris, et il est très clément eu égard à la virulence de nos propos. Clément Maraud, ex-correcteur, et moi, nous avons tous deux été condamnés à verser à Yves Michalon un euro de dommages et intérêts. Serge Delbono, webmaster, a été relaxé. Quant aux propos qui me sont reprochés, ils ne figurent pas sur ce site Internet, qui restera donc en l’état (voir la rubrique d'à côté, "Michalon piège à c..." et ses témoignages édifiants). Michalon n'a pas obtenu ce qu'il demandait : rien moins qu'une publication judiciaire dans Le Monde et Le Figaro. C'est donc une victoire pour nous.

Le Tribunal a manifestement tenu compte des conditions discutables de la reprise de Michalon par Max Milo, du montant abyssal des pertes accumulées, du nombre anormal des procédures judiciaires engagées contre cette maison d'édition depuis sa création, et de la curieuse confusion entre les « éditions Michalon », « Michalon éditions », « Yves Michalon Editeur » et Yves Michalon lui-même. De plus, comme l'un de nos témoins l'a affirmé, les « michalonnades » continuent depuis la reprise.

On retiendra de ce procès l'invraisemblable ligne de défense d'Yves Michalon, expliquant benoîtement à la Cour que ce seraient ses auteurs et sous-traitants qui devraient porter le chapeau de sa faillite. En effet, les impudents ont demandé à être payés ! Où irions-nous si tous les créanciers exigeaient leur dû ! L'économie s'effondrerait !
Bref, comme l’écrivait le Canard Enchaîné dans son édition d’il y a trois semaines, « Porter plainte pour diffamation, c’est toujours porter plainte contre soi-même ».

26 octobre 2012

Langue de pute pour langue de bois


J’ai été invitée récemment à la Fête du livre de Saint-Étienne. Un évènement, nous dit-on, qui rassemble des centaines d’ « auteurs ». C’est curieux, on ne dit plus guère écrivain, on dit auteur. Ecrivain, ça fait scribouillard, on entend la plume qui crisse sur le papier, c’est pénible pour l’oreille. En revanche, « auteur » est connoté plus rond, plus souple, la preuve : le mot glisse sur la langue. L’écrivain gratte laborieusement, alors que l’auteur(e) crée. L’un transpire, quand l’autre produit spontanément et appose sa marque. On en conviendra, c’est beaucoup plus chic.
Donc, en tant qu’auteur(e), on m’a donné un pack de bienvenue avec plein de documents dedans pour présenter la ville. L’un d’entre eux, « 80 actions pour dynamiser l’attractivité stéphanoise », a attiré mon attention par son titre prometteur. Magnifique exemple de jargon, me suis-je dit. Je l’ai ouvert : dedans, ô merveille, un feu d’artifice de langue de bois. Rien ne manque : compétence ; dynamique ; indicateurs ; capitaliser ; formation ; retour d’expérience ; valider ; pilotage ; action à engager ; positionnement ; stratégie d’innovation ; vision ; démarche ; partenaires ; réseau ; visibilité ; convivial ; durable. Sans oublier le roi du bal : projet. Et le tout saupoudré d’anglicismes, co-working et autres showroom. N’en jetez plus, il en pleut de partout.
Je ne suis pas venue pour rien à Saint-Etienne car, toujours dans le même opuscule, j’ai appris des mots nouveaux. Une gare se dit « pôle d’échange multimodal », un vélo se traduit par « mode de déplacement doux », un panneau indicateur devient une « signalétique urbaine », un carrefour un « plateau piéton », un échange une « intermodalité ». C’est clair, j’ai un train de retard. Du reste, je ne sais même pas comment on dit « train » en jargon. Je n’ai plus qu’à aller me faire voire ailleurs, autrement dit à me faire requalifier dans une zone non-aménagée.
nb : j'ai été par ailleurs fort bien reçue à Saint-Etienne, merci aux organisateurs !

16 octobre 2012

Veni, vidi, vinci

C'est chouette, la gauche au pouvoir. L'ordre règne. Ambiance de guerre civile aujourd'hui avec l'"opération César", à 30 km au nord de Nantes. Pas moins de 500 policiers mobilisés, des hélicos, des barrages de police partout. Tout ça pour seulement "sept occupations illégales sur des espaces bâtis et quatre zones d'occupation illégales", dit la Préfecture de Loire-Atlantique. En clair, il s'agit de vider 7 maisons, ça fait donc 71,4 flics par baraque, les Français ne paient pas des impôts pour rien.

Il faut bien ça pour déloger les opposants à la construction de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, dont le chantier, confié au groupe de BTP Vinci, doit débuter en 2013. Un projet cher, polluant et inutile, mais tant pis. L'Ayrault-port sera construit, foi Jean-Marc Ayrault, maire de Nantes et Premier ministre. Aurait-il le feu au tarmac ? L'homme tient à son gadget, probablement pour prendre un peu de hauteur. Il va en avoir besoin pour conserver les suffrages de la gauche. Car comme le dit le dicton, "si octobre s'emplit de vent, du froid tu pâtiras longtemps".
http://www.aeroport-nonmerci.fr/


11 octobre 2012

Femmes à lunettes


Je porte des lunettes, et alors ? Cela gène quelqu’un ? C'est clair, une véritable campagne anti-binocles commence avec les « révélations » concernant les lunettes de la journaliste de gauche (et compagne de ministre) Audrey Pulvar. Elles coûteraient 12000 euros et seraient fabriquées en écailles de tortue. Audrey, tiens bon, toutes celles qui portent verres sur leur nez te soutiennent.
La télé, c’est bien connu, se méfie des bésicles : peu de celles qui s’y montrent osent en porter. Pourtant, il s’en vend 11 millions de montures par an en France. Mais les lunettes, c’est un peu comme les pantoufles, on a tendance à les cacher. Soulevons la chape de déni, le voile de réticence. Les porteuses de lunettes doivent faire leur coming out.
Avant de s’afficher, elles doivent se poser deux questions essentielles. D’abord, en quoi sont-elles fabriquées ? Les miennes, je l’avoue avec réticence, sont en plastique. Or, le plastique pollue horriblement. Le bois ou, mieux encore, la laine de mouton, matériaux plus durables, seraient plus indiqués, je le confesse. Et puis, combien ont-elles coûté ? J'ai payé les miennes, euh, environ 30 tickets restaurant. Je sais ce que vous allez dire : tous les SDF que j'aurais pu nourrir avec cet argent ! A ce tarif là j’ai eu raison d’aller me faire voir chez les Belges.
Outre-Quiévrain justement on attend Arielle Dombasle, qui elle aussi porte des verres, mais fumés seulement. Aux dernières nouvelles, la belle traîne des pieds, renâcle à prendre le Thalys et fait la mauvaise tête. « Vivre en Belgique ? Plutôt mourir ! », crache-t-elle. Arielle, garde ton venin, car moi je réponds : « Coucher avec BHL, ce myope qui cache son jeu et tombe binocles dès qu’il apparaît en public ? Plutôt crever ».